Nécessité d'améliorer les soins de santé mentale pour les demandeurs d'asile
On utilise dans ce communiqué le terme « demandeurs d’asile » bien que le terme officiel soit « demandeurs de protection internationale ».
Les demandeurs d'asile sont plus exposés aux problèmes de santé mentale en raison de divers facteurs de vulnérabilités avant, pendant et après leur parcours migratoire. Les différentes autorités belges devraient reconnaître ces vulnérabilités et prendre des mesures pour améliorer la prise en charge de la santé mentale pendant la procédure d'asile. Les mineurs non accompagnés méritent une attention particulière à cet égard. Investir dans la santé mentale dès l'arrivée est crucial pour une bonne intégration et une bonne participation à la société belge. Dans son dernier avis, le Conseil Supérieur de Santé formule des recommandations concrètes pour remédier aux lacunes actuelles.
Des vulnérabilités exacerbées par les procédures d’asile
Du fait, entre autres, de leur parcours migratoire, les demandeurs d'asile sont plus susceptibles de souffrir de stress post-traumatique, d'anxiété, de dépression et des formes plus sévères de souffrance mentale par rapport à la population générale. Le racisme, la discrimination et l'isolement social dans le pays d'accueil peuvent perpétuer ou exacerber ces vulnérabilités. Pour justifier leur demande de protection internationale, ils sont amenés à devoir partager leurs histoires personnelles, souvent traumatisantes, à de (trop) nombreuses reprises à des fins administratives et non thérapeutiques.
De plus, la complexité des procédures d'asile, les longs délais d'attente et le manque d'informations précises (notamment sur le contexte juridique) font qu'il est difficile pour les demandeurs d'asile de se construire une perspective d'avenir. Enfin, le manque de places d'accueil pour les demandeurs et le long séjour dans un centre d'accueil sont des sources importantes de stress supplémentaire qui ont un impact majeur sur le bien-être émotionnel du demandeur.
Accès inadéquat aux soins
Toute personne, quel que soit son statut administratif, a droit à la santé et à l'accès à des services de santé de qualité. Malgré les nombreux rapports consultatifs à ce sujet, l'accès aux soins de santé mentale et leur qualité restent souvent problématiques pour les demandeurs d'asile en Belgique. Le Conseil Supérieur de la Santé pointe du doigt des obstacles, par les demandeurs d'asile et les prestataires de soins :
- la méconnaissance du droit aux soins de santé et du système de santé,
- les problèmes de communication, notamment du fait de la langue,
- les facteurs culturels, y compris les attitudes à l'égard des problèmes de santé mentale et de leur prise en charge, et
- le manque de formation et de soutien.
Recommandations par niveau
Le Conseil Supérieur de la Santé s'adresse aux différents niveaux politiques concernés par les soins aux demandeurs d'asile.
Aux responsables politiques européens
Fonder la politique d'asile avant tout sur les droits humains. Le Conseil appelle donc à la mise en place de routes migratoires sûres et à la poursuite de la lutte contre la violence à l'égard des réfugiés au cours de leur parcours migratoire.
Aux autorités fédérales
Fournir un logement à chaque demandeur d'asile. Le Conseil entend par là un logement humain adapté, en veillant à la sécurité physique et psychologique, permettant aux demandeurs d'asile de prendre leurs propres décisions quant à l'organisation de leur vie quotidienne, de se constituer un nouveau réseau social et de disposer d'espaces où ils ont la possibilité de préserver leur intimité et d’être au calme. Il est essentiel de fournir un soutien psychosocial dans les centres d'accueil et des soins supplémentaires pour les groupes vulnérables tels que les familles, les femmes, les mineurs et les personnes LGBTQIA+. Pour ce faire, le personnel des centres d'accueil doit être plus nombreux et mieux formé.
Au cours des procédures d'asile, les autorités compétentes devraient informer clairement les demandeurs du contexte juridique de la procédure et respecter les délais légaux de décision. Dès la première étape de la procédure d'asile, à savoir l'enregistrement et le dépôt de la demande d'asile auprès de l’Office des Etrangers (OE), la présence d'un avocat et d'une personne de confiance devrait être autorisée. Des interprètes bien formés ayant des connaissances de base en matière de santé mentale peuvent améliorer la communication.
Aux associations professionnelles et aux autorités (aux niveaux fédéral et régional) responsables de la santé
Rendre les soins de santé mentale accessibles à tous, y compris aux demandeurs d'asile. Fournir des soins centrés sur la personne, sensibles à la culture et adaptés aux besoins actuels des demandeurs d'asile. Renforcer la médiation interculturelle et l'accès aux interprètes. Soutenir les psychologues, les médecins (généralistes), les psychiatres et les autres prestataires de soins de santé dans la préparation des certificats médicaux pour les procédures d'asile. Ce groupe cible particulier constitue un maillon important et mérite donc une assistance et une attention appropriées.
Aux professionnels de la santé, aux universités et aux établissements d'enseignement supérieur
Promouvoir et intégrer les approches sensibles à la diversité culturelle et l'acquisition de compétences dans le travail avec les réfugiés et les migrants dans la formation des (futurs) professionnels de santé. Il peut s'agir, par exemple, d'apprendre à reconnaître les croyances négatives liées à la souffrance mentale ou d'identifier et de prendre en compte les problèmes de santé spécifiques aux migrants et aux réfugiés, tels que les traumatismes de guerre, les mutilations sexuelles ou la torture. Encourager une attitude ouverte.
Ces différentes recommandations peuvent contribuer, chacune mais surtout ensemble, à améliorer la santé mentale des demandeurs d’asile en Belgique. Ainsi, la Belgique respecte ses engagements en matière de droits humains. Pour les demandeurs d’asile qui se verront attribuer des documents de séjour (en 2023 : 43,5 % des cas, soit environ 12 800 personnes) et qui donc ont la possibilité de rester en Belgique, avoir une attention plus soutenue envers leur santé mentale facilitera leur intégration dans la société belge.
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